Au moment où l’auteure haïtienne, Yanick Lahens, donne au Collège de France sa leçon inaugurale dans le cadre de la chaire des Mondes francophones dont elle est la première titulaire, son éditeur, Sabine Wespieser, réédite une vingtaine de ses textes courts parus entre 1994 et 2006. C’est l’occasion de découvrir le terreau sur lequel elle a développé son œuvre, devenue une part majeure de la littérature contemporaine de son pays.
En fait, on retrouve assez vite à la fois le regard de l’auteure sur son pays, sur les femmes et les hommes de son pays, – les femmes surtout – qui tentent d’y vivre, d’y survivre, et son écriture déjà très forte, colorée, sensuelle, comme un kaléidoscope dont les fragments de verre coloré reflètent une même réalité émiettée qui tourne sur elle-même. Chacune de ces nouvelles composant ce recueil, ajoute des notes, des mélodies, des refrains, des silences aussi quand l’ineffable arrive, comme dans des improvisations de jazz qui se démultiplient et se retrouvent enfin pour poser un regard effrayé, tendre ou désespéré sur ces personnages explosifs autant qu’explosés.
C’est avec des phrases généreuses, fortes et mystérieuses que Yanick Lahens décrit la vie de ces nombreux personnages, plus de femmes que d’hommes, l’omniprésence de l’amour, du désir, du sexe, de la tendresse, de la violence, la détresse, la mort, où interviennent loas et zombis. Son écriture allie deux qualités qui peuvent sembler contradictoires, une netteté qui lui donne un caractère de témoignage quasi documentaire, et une force émotionnelle volcanique, une résonance poétique qui font profondément partie de l’imaginaire haïtien ancré dans une réalité souvent effroyable mais qui donnent à la littérature de ce pays, son éclat si particulier.
Parfois, souvent, c’est l’effroi qui prime dans ce pays qui semble marqué par une malédiction séculaire alors qu’il est le premier à avoir conquis son indépendance face à la puissance coloniale. Et dont l’histoire récente, et l’actualité de ces dernières semaines, semblent le pousser dans un vide insondable. Mais dont la littérature, l’une des plus singulières du monde, est le témoin implacable et resplendissant de cette histoire tragique.
D’autres livres de Yanick Lahens dans ce blog :

J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flâner sur vos pages. Une belle découverte et blog très intéressant. Je reviendrai m’y poser. N’hésitez pas à visiter mon univers. Au plaisir.
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Un grand merci pour votre aimable commentaire : cela m’encourage à continuer. Jean-Marie
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