Et rien d’autre – James Salter (Editions de l’Olivier)

Et rien d'autreCe livre, paru cet automne, a été célébré comme un chef d’œuvre par toute la critique littéraire française et internationale. Je m’attendais donc à être très impressionné.

Tout se passe dans les milieux intellectuels nord-américains, ici plus particulièrement le monde de l’édition. Cela commence par des pages très fortes racontant la fin de la seconde guerre mondiale entre le Japon et les Etats-Unis, vue par de simples soldats dans les bateaux visés par les avions kamikazes, où la vie n’est qu’aléa. A leur retour, ces héros ne savent plus s’il vaut mieux se souvenir ou oublier. Rapidement, les ambitions professionnelles et les rêves amoureux donnent à ces souvenirs l’allure de lettres toujours conservées mais jamais relues.

Tout le long du livre, on reste dans  l’entre-soi  d’une certaine intelligentsia où des personnes cultivées et intelligentes se rencontrent dans les soirées, au restaurant, en vacances. La plupart, sans être richissimes, sont relativement à l’abri du besoin ; ils ont une vie sentimentale et sexuelle compliquée et touffue. Leurs conflits sont réglés à fleuret moucheté mais où la jalousie n’est pas un vain mot. Sous le vernis d’une bonne éducation, sans être rigide ni d’arrière-garde, chacun cherche sa voie, la trouve, la perd, la retrouve, la reperd et, en fin de compte, une douce nostalgie imbibe le roman car les idéaux, les ambitions, les amours, les amitiés sont bousculés, abîmés mais pas totalement oubliés. Les relations familiales sont décrites avec férocité, les relations amoureuses, avec indulgence. Les voyages les mènent en Grande-Bretagne, Italie et France, sources de leur culture, lieux du retour sur soi, fuites loin de la frénésie de l’Amérique quotidienne.
Reste la saveur douce-amère de la quête impossible du bonheur, des rêves d’une époque réchappant du pire, mais qui finira par s’étioler. Un goût de vertige, entre personnes de bonne compagnie, avec un grain de futilité, voire d’insignifiance.

L’écriture de James Salter avance sans à-coups, un peu comme un métronome, où les détails sont évoqués sans marquer d’arrêt, sans envolée, toute de simplicité confinant à la platitude. A l’instar de la vie de cette génération ? C’est finalement dans la recherche de l’amour, dans le vertige de la séduction, dans l’éblouissement du plaisir, dans la détresse de l’abandon que la phrase de James Salter est la plus éloquente. Mais, avec le temps, ces moments d’absolus laissent la place à la monotonie de la vie qui prend le masque de la tranquillité, parfois même de la sérénité.

James Salter (photo Ulf Andersen)
James Salter (photo Ulf Andersen)

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