En ouvrant Le corps des anges de Mathieu Riboulet, je savais que cela allait parler de mort et de sexe entre hommes. J’avais lu, en effet, un autre de ses livres, L’amant des morts (Editions Verdier) qui abordait de façon sidérante ces deux sujets d’autant plus mêlés que le sida a tué, en Occident, de nombreux homosexuels.
Le corps des anges a été écrit en 2005, avant L’amant des morts. Dans Le corps des anges, deux jeunes hommes. Rémi, d’abord, qui vit quelque part dans le centre de la France, avec ses parents, sa sœur et des enfants « de la DASS » recueillis par sa mère. Son père est paysan, essayant de prendre le train de la modernité. Rémi a une curieuse habitude : se jeter par terre, tête la première. Avec sa Mobylette, il a deux accidents : en rouvrant les yeux après le second, il découvre l’ovale d’un visage d’une jeune femme – ou était-ce un ange ? Il ne le revoit pas. Plus tard, un orage le surprend alors qu’il travaillait avec le tracteur de l’exploitation paternelle. Il aperçoit un autre ange, avec « une ombre serpentine incrustée sur le dos, le lézardant du cou à la naissance des reins. » (page 36). Il le revoit. C’est un garçon, il s’appelle Gabriel.
Gabriel habite « la maison des fous », où se retrouvent ceux qui avait « des activités invraisemblables (…) menées à pure perte, à visée essentiellement rééducative et fort peu agricole, comme la soudure, la menuiserie, la mécanique. » (page 46). Gabriel a vécu à Paris dans une famille aimante. Quand il a seize ans, ses parents meurent dans un accident de voiture, « un glaciation en plein vol » (page 47). Il dérive, « morceau de banquise détaché, glace perpétuelle même au sein des courants les plus chauds » (page 49). Il découvre le sexe avec les hommes. Longtemps après, il va à l’endroit où ses parents sont morts. Pour s’y recueillir ? Plutôt s’y abîmer …

Je n’évoquerai pas la troisième partie du livre, où les deux jeunes hommes veillent leurs morts, récents ou passés, dans ses moments extrêmes où tous les temps se mélangent et se défont… Les gendarmes finissent par arriver.
Ce récit ne serait rien sans l’écriture extrêmement travaillée de l’auteur, ses phrases sculptées et modelées pour en faire sourdre ce qui dépasse la réalité prosaïque. Cela peut parfois frôler l’exercice de style. Mais cette sophistication de la phrase est indispensable à la fois pour accepter la dureté du propos, fouiller dans les entrailles de la mort et de la vie et provoquer le nécessaire léger décalage qui rend ce livre irradiant comme un astre noir.
Mathieu Riboulet est un très grand auteur de notre époque. Si vous avez aimé ce livre, ou si vous le découvrez, sachez qu’une adaptation en court-métrage de celui-ci est en train de se préparer !
https://www.facebook.com/pages/Le-Corps-des-Anges/395862017218234?ref=hl
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Merci beaucoup pour l’info concernant la préparation du film et, aussi, pour le lien avec mon blog qui figure sur la page Facebook du projet de film. Je vous souhaite bonne chance pour la réalisation de ce projet.
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