« Le quatrième mur » commence par une scène saisissante, en six pages : au Liban, en octobre 1983, un char israélien tire sur une voiture, le chauffeur est tué, le passager – le narrateur – est vivant. La mort l’a-t-elle vraiment épargné ? Tout le livre décrit le cheminement qui aboutit à cet épilogue hallucinatoire, mais pourtant bien réel…
Avant d’être romancier, Sorj Chalandon a été journaliste à Libération. Il a couvert certains conflits, notamment la guerre du Liban au début des années 80, et a été témoin des massacres de Sabra et Chatila en septembre 1982. Cette guerre est le cadre de ce livre dont le sujet est une utopie : peut-on jouer dans le Beyrouth déchiré par la guerre civile « Antigone », celle de Jean Anouilh, créée dans la France occupée par les Allemands en 1943 ? Antigone qui dit non et qui en meurt…
Le narrateur, Georges – double littéraire de l’auteur – a toujours milité dans l’extrême gauche et partage le combat des Palestiniens. Son meilleur ami, Sam, juif d’origine grecque, veut monter la pièce d’Anouilh dans le Beyrouth livré à une guerre fratricide en la faisant jouer par des acteurs venant de chacune des communautés qui s’affrontent. C’est Georges qui va y aller car Sam se meurt d’un cancer.
Tout le livre décrit la poursuite de cette utopie radicale qui se fracasse contre le massacre de Chatila. Utopie nécessaire et toujours renouvelée où l’art – et singulièrement le théâtre, art vivant – peut, ou croit pouvoir inverser ce qui parait inexorable…
Sorg Chalandon décrit très précisément la guerre, celle qu’il a vécue comme journaliste au plus près des événements. D’où une description aux ras des tirs et des bombardements qui plonge le lecteur dans ce conflit grâce à son écriture précise et brute. Description au ras des cœurs aussi, car « Le quatrième mur » rend compte des aléas et des détours des sentiments, qu’ils soient amoureux, amicaux, familiaux. Georges revient en France, extirpé de justesse de Beyrouth bombardé. Il ne peut pas retrouver sa place antérieure comme mari, père, ami. Il ne cesse de ressasser son échec puisque la pièce n’a pu être représentée devant un public et que les futurs acteurs ont été tués pour la plupart…
Il retourne à Beyrouth et n’en reviendra pas. Il traverse le quatrième mur, celui qui sépare les acteurs du public sur la scène d’un théâtre, celui sépare l’utopie de la réalité…
Une erreur dans votre commentaire…. »commence par une scène saisissante, en six pages : au Liban, en octobre 1983, un char israélien tire sur une voiture »
Votre remarque correspond sans aucun doute à la phrase située en page 12 § 2 du 1er Chapitre intitulé « Tripoli, nord du Liban – jeudi 27 octobre 1983 » :
« Sors de là Georges ! Nous roulions le long de la côte. Le soleil se levait derrière les collines. Juste après le virage, un tank syrien couleur sable, embusqué, immense. Il nous barrait la route……..il ne va pas tirer, il ne va pas tirer sur un taxi ! »
Merci de bien vouloir rectifier.
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Le char n’est pas israélien ? Ayant rendu le livre à la bibliothèque, je ne peux pas vérifier…
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