A Dallas, Jeff Sutton, chauffeur de taxi, prend en charge à l’aéroport une jeune femme pour la reconduire chez elle. Elle n’a pas de monnaie, lui demande d’attendre chez elle deux minutes. Jeff observe et touche les vitres de la maison car il reconnait, grâce à une ligne bleue, l’entreprise où il a travaillé une douzaine d’années auparavant. En revenant chez lui, il prend en charge gratuitement – ce qui est illégal – deux jeunes filles très alcoolisées. L’une d’elles vomit. Il prend soin de nettoyer son taxi avant de revenir chez lui. Il s’apprête à aller boire une bière avec un de ses potes. On sonne. Ce sont les flics. Il n’ira jamais boire cette bière avec son pote…
C’est ainsi que commence Arrêtez-moi là de l’écrivain américain d’origine écossaise, Iain Levison. C’est l’histoire d’une erreur judiciaire, inspirée d’un fait divers réel, l’affaire Richard Ricci, qui avait fait grand bruit aux Etats-Unis en 2002. Jeff est accusé d’avoir enlevé et tué la fillette de la femme qu’il avait ramené de l’aéroport,à la suite d’une enquête policière bâclée. A vous de découvrir la suite en lisant ce roman qu’il n’est guère possible d’abandonner avant d’atteindre la dernière page
Ce livre est bien plus riche et profond qu’un bon roman policier qui dénonce, sans la moindre indulgence, les travers du système judiciaire américain : le narrateur est le suspect lui-même. Le lecteur est à l’intérieur de ses pensées, de ses sentiments, de ses sensations, entre espoir et résignation, entre douleur et réconfort, entre révolte et reconnaissance, suivant les moments, les évènements, les retournements de situation. Généralement, un roman policier, comme les films et les séries du même genre, sont construits à partir de la vision du policier, de la victime, de l’accusation, du juge parfois, mais très rarement à partir celle de l’accusé, encore moins souvent depuis celle d’un suspect accusé à tort.
« Arrêtez-moi là » prend alors une dimension quasi « dostoïevskienne » : c’est une sorte de bagne dostoïevskien qui est décrit dans ce livre quand Jeff Stuton raconte son expérience de la prison, son sauvetage en dernière minute, l’impossibilité de revenir dans le monde des hommes libres…
Pour finir, je vous propose une citation qui m’a fait beaucoup réfléchir… : « Ce ne sont pas l’ennui, l’injustice et l’absence de raison d’être qui tuent. C’est l’espoir. L’espoir est un poison. L’espoir vous brûlera de l’intérieur. L’espoir est un verre de soude caustique. »
D’accord ? Pas d’accord ?