Le début de ce roman m’a franchement énervé : une cinquantenaire qui s’ennuie se prend à vouloir revivre ses émois d’adolescente en allant rejoindre son premier amour … Aucun sexisme dans cette première impression, cela m’aurait autant énervé, venant d’un homme.
Heureusement, Le premier amour prend vite la route, celle qu’Emilie suit pour répondre à un appel court et mystérieux venant de celui qu’elle a aimé 35 ans avant. Elle abandonne tout sur le champ, mais, sur cette route, elle musarde… Et c’est le plus intéressant de ce livre. En fait, ce premier amour n’est qu’un prétexte à un retour sur les empreintes claires-obscures de sa vie : le couple obligé et triste de ses parents, son éducation entre bigotterie et culpabilité, sa sœur ainée mongolienne fan de Mike Brant, son mari devenu une habitude, ses trois filles devenues un peu lointaines, le temps qui passe… et Dario, ce premier amour dont le souvenir doux et intangible est une sorte de trésor sacré.
Tout cela peut sembler assez banal en fait. Mais cette remise en question de sa vie, cette prise de recul avec son passé se déroulent le long de la route, de rencontre en rencontre : elle rend visite à sa sœur, dans une scène sensible et splendide de la visite dans un hôpital psychiatrique, elle voit une de ses filles dont le compagnon ne lui sied pas. Elle essaie d’oublier son mari et songe à une vie où rien n’est encore définitif. Mais finit par se demander « si elle ne confond pas ses souvenirs avec la nostalgie, ses chagrins avec l’attendrissement et la paresse avec le temps perdu » (page 199). Rien que par cette phrase, elle évacue tout auto-appitoiement auquel homme et femme de cinquante ans sont tentés de se livrer dans un narcissisme masochiste ou vengeur.
A l’arrivée, rien ne se passe comme elle l’espérait. Le roman change complètement de ton : c’est une énigme à résoudre, pas du tout un amour à revivre. Assez tarabiscotée, la fin donne la clé de l’énigme… Ce trajet finit par une embardée déroutante.
Finalement, ce livre n’est pas une histoire d’amour. C’est une route à suivre. Je me suis laissé conduire grâce à un style loin de tout pathos et une certaine dose d’autodérision qui libèrent l’expression d’une sensibilité réfléchie.
une bien jolie dame, quand même, semble-t-il…
mais bien sûr, ce n’est pas ce qui fait un bon roman….
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