Le dessin animé australien, Mary et Max, d’ Adam Elliot raconte une curieuse histoire d’une correspondance épistolaire, à une époque sans email ni SMS, entre Mary, une gamine australienne de 8 ans moche et esseulée entre deux parents complètement barrés (surtout la mère qui se noie dans le sherry), et Max, un juif obèse de New-York dont les compagnons sont un chat et un poisson rouge ainsi que quelques êtres humains quelque peu clignotants. Une histoire triste, donc, « incarnée » par des personnages en pâte à modeler, descendants de Wallace et Gromit, loin, très loin des studios américains.
Et pourtant, c’est drôle. Grâce d’abord à ce type d’animation, à la fois réaliste et totalement fantaisiste : nous ne sommes pas dans le pays des rêves, un monde idéalisé, mais au contraire cette banlieue ennuyeuse de Melbourne est aussi glauque et terne que les immeubles de Manhattan et ces trottoirs jonchés de détritus et dominés par le pâle éclat des Twin Towers qui étaient donc encore debout. C’est drôle parce la réalité, aussi pesante soit-elle, est constamment éclairée de détails graphiques, de cocasseries, d’absurdités qui sont en fait le résultat d’une logique poussée jusqu’au bout.
Vingt ans de correspondance avec des ruptures, des silences, des remords, avec des passions partagées, des questions indiscrètes, des cadeaux symboliques. Vingt ans de deux destins qui n’arrivent pas vrament à se croiser, mais qui s’interagissent étroitement et même violemment, une tentative de suicide d’un côté, un emprisonnement de l’autre… C’est triagique, et filmé avec une virtuosité parfois très élaborée comme la tentative de suicide de Mary.
Et pourtant l »humour est toujours là, grâce aux innombrables personnages secondaires, entre autres, un clodo très inventif pour solliciter la pitié des passants, une mère à la fois terrible et dérisoire, à un psy qui ferait rentrer sous terre Papa Sigmund, des poissons d’aquarium au destin toujours incertain…
La fin du film est triste mais pas larmoyante. Une sorte de mélancolique tranquillité s’installe, celle de ceux qui savent qu’ils ont vécu la meillleure part de leur vie, malgré les autres, malgré eux, malgré tout.
Mary et Max me rappelle Le sens de la vie pour 9,99$, dont j’avais parlé en mai dernier. Même type d’animation, même sorte de destinées humaines absurdes, même humour décalé et surprenant…