Il y a quelques semaines, c’était par la sacristie que j’étais entré dans la cathédrale que répresentait pour moi, a prioiri, l’oeuvre de Julien Gracq, avec en lisant en écrivant. J’ai voulu continuer à découvrir cette cathédrale en visitant ce qui pourrait être son choeur, Le rivage des Syrtes, le livre le plus connu de Julien Gracq, Prix Goncourt en 1951, refusé par l’auteur.
J’avais pris soin de ne rien lire sur ce livre avant de l’ouvrir. Peut-être aurais-je dû ! J’ai passé mon temps à essayer de distinguer quelques traits un peu nets durant ces 320 pages. En refermant le livre, aucun projecteur n’avait suffisamment éclairé le choeur de la cathédrale, toujours enveloppé dans une nuée tenace et indéchiffrable.
Bien sûr, j’ai tout de suite pensé au Désert des Tartares écrit par Dino Buzzati en 1938 (mais traduit en français après que Gracq ait écrit Le rivage des Syrtes). Ce sont deux livres sur l’attente. Dans celui du Buzzati, c’est une attente pour rien. Mais les arêtes du désert sont tranchantes (je suis certainement influencé par les images du film de Valerio Zurlini sorti en 1976 avec Jacques Perrin).
Dans celui de Gracq, il se passe quelque chose. Mais les navires et les volcans n’apparaissent qu’en ombres fugaces. J’imagine d’ailleurs mal comment un film pourrait avoir été tourné d’après le livre (de toute manière, la question ne s’est jamais posée, me semble-t-il, étant donné le peu de goût de Julien Gracq pour les adaptations filmées de romans). Pour un lecteur comme moi qui traduit en images dans mon cerveau ce que je lis, lire Le rivage des Syrtes relève de la gageure, malgré l’abondance des descriptions. Peut-être ai-je dormi en les lisant, bercé par le rythme lent des longues phrases parsemées d’adjectifs comme les ajoncs parsèment les chemins côtiers de Bretagne ?
Dans les moments où ma conscience était restée suffisamment alerte, j’ai perçu qu’une « intrigue » se développait. Vers la fin du livre, après quelques apparitions et diisparitions fantômatiques, je me suis mis à croire qu’allait se lever l’orage tant attendu, même tant désiré. Le malaise des habitants d’une ville engendré par un sentiment du danger imminent était décrit comme celui des grondements du tonnerre entendu au loin. Mais cet orage s’est dissous dans un bureau sombre où celui qui manipule tout donne de longues explications au narrateur par lequel tout est arrivé. Et « un pas à la fin comblait l’attente de cette nuit vide, et je savais pour quoi désormais le décor était planté« . Oui, une nuit vide sur un décor à peine ébauché. Un décor planté dans le brouillard…
Bref, je n’ai pas compris grand chose. C’est en lisant les commentaires que j’ai vu que c’était tout à fait normal. Gracq lui même a expliqué qu’il a cherché « à libérer par distillation un élément volatil « l’esprit-de-l’Histoire », au sens où on parle d’esprit-devin, et à le raffiner suffisamment pour qu’il pût s’enflammer au contact de l’imagination« .
J’en ai déduit que je ne suis pas un expert en distillation littéraire ! Et que mon imagination n’était pas assez raffinée.
Mais si c’était le genre de livre auquel on pense bien plus une fois refermé, si ce mystère parfois ennuyeux était le ferment d’une longue réflexion rêveuse qui se poursuit au fil du temps… au moment de s’endormir !
oui… il faut du courage pour aller jusqu’au bout!
ces écrivains érigés en monuments me laissent… de marbre!
ainsi aussi de cet autre, qui vient de mourir… Robbe-Grillet…
qu’en restera-t-il dans un siècle….
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Robbe-Grillet… j’ai essayé une fois : le livre m’est tombé des mains avant même que mes yeux se ferment.
En revanche, j’ai lu avec intérêt deux livres de Nathalie Sarraute. Mais elle même ne voulait pas qu’on la mette dans le sac du « nouveau roman » dont Robbe-Grillet était le chef de file (la file n’était pas bien longue …)
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ah oui, Nathalie Sarraute, ça c’est autre chose!
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