Alors que le buzz sur le film La possibilté d’une île commence à courir le long du web (voir à ce sujet le blog de Pierre Assouline), c’est par hasard que j’avais commencé courant janvier la lecture du livre qui traînait sur ma table de nuit depuis au moins six mois.
C’est le troisième livre de Houellebecq que je lis : comme d’habitude, je suis passé de l’exaspération à une sorte de fascination. Résultat, je l’ai lu en entier. Son écriture est facile et je n’ai pu m’empêcher de me demander « comment ça va finir ? », comme dans un roman policier !
Ben, j’ai été déçu ! Le sujet est pourtant passionnant : quelle peut être l’évolution de l’espèce humaine en regard de l’évolution scientifique qui a permis la possibilité du découplage, pour tout le monde, entre le sexe et la procréation.
Je continue à penser que c’est le paradigme le plus important du XXème siècle, voire même de l’humanité : le sexe peut être une occupation sans autre enjeu qu’elle même. Et la conception de nouveaux êtres humains est possible sans activité sexuelle.
Houellebecq apporte une réponse que je trouve maladroite : en plongeant dans la science fiction à deux balles et en passant par l’artifice d’une secte, il traite ce sujet de façon anecdotique, comme si toute cette construction n’est qu’une mise en scène pour faire passer la seule préoccupation de l’auteur : sa bite ! C’est son droit le plus élémentaire d’être obnibulé par son sexe, c’est le cas d’une bonne partie des hommes. Mais faut-il inventer toute cette logomachie ? Cela devient franchement risible dans les chapitres où c’est le néo-humain qui parle. Quant au dernier chapitre, c’est une errance dont j’ai eu l’impression que l’auteur ne savait pas comment l’arrêter…
Quant à la description de notre société se noyant dans la consommation et le sexe, tout ceci devient singulièrement convenu : autant aller voir Bigard ! Cependant, parfois, quelques phrases pertinentes sur l’amour et l’âge émergent : Dans le monde moderne on pouvait être échangiste, bi, trans, zoophile, SM, mais il est interdit d’être vieux (page 213).
Toujours par hasard, je lisais, mardi dernier dans le train, le dossier spécial du numéro 900 de Courrier international sur « le sang neuf » : notamment deux articles, l’un de Graham Lawton dans New Scientist, l’autre de Johann Harri dans The Independent, posent clairement des éléments sur la possibilité d’une nouvelle espéce humaine :
» (…) l’homme aura un pouvoir quasi illimité sur sa biologie – celui de mettre fin à la maladie, d’abolir la douleur et la souffrance, de nous doter d’une beauté et de capacités physiques et mentales surhumaines, et de ralentir radicalement, voire d’arrêter, le vieillissement. “Je pense que nos descendants songeront à notre vie avec commisération, comme nous songeons à la vie de nos ancêtres du pléistocène”, déclare James Hughes, spécialiste en bioéthique au Trinity College de Hartford, dans le Connecticut. (extrait de l’article de Graham Lawton dans New Scientist traduit dans le n° 900 de Courrier international)
(…) on devrait voir fleurir ce genre de technologies qui permettront d’améliorer radicalement la vie humaine. Il devient de plus en plus facile pour les chercheurs de changer les gènes de la toute première cellule d’un embryon humain – et donc de chaque cellule de l’enfant à naître, de ses enfants, de ses petits-enfants, et ainsi de suite, indéfiniment. Grâce à de nouvelles techniques de fécondation in vitro (FIV), on peut désormais implanter de telles cellules plus aisément. Ce long processus qu’est la sélection naturelle va bientôt être complété par un processus bien plus rapide de sélection volontaire. (extrait de l’article de Johann Harri dans The Independent traduit dans le n° 900 de Courrier international)
Les deux articles n’ont pas la même opinion sur les conséquences de ces possibilités scientifiques : le premier se pose la question de la maîtrise de cette évolution (« La plupart des experts conviennent que l’amélioration de l’homme est en marche et qu’on ne peut arrêter ce qui a commencé. Mais le résultat n’est pas prédéterminé. Il est temps de choisir notre avenir« ). Le deuxième en attend avec certitude une évolution vers des lendemains plus enchanteurs (« D’ici un siècle, une génération d’hommes et de femmes plus intelligents, plus sains »).
Tout ceci est bien plus intéressant que le livre de Houellebecq. Ecrirait-il le même maintenant ? On verra ce qu’il en fera comme film puisqu’il le réalise lui-même ! Mais je ne suis pas certain d’aller le voir…
La piste technologiste n’est sans doute pas la seule dans l’émergence d’une espèce nouvelle à partir de l’espèce humaine actuelle : http://blogologie.skyrock.com/3019650855-AURORE-DE-L-ESPECE-CREALISTE.html
J’aimeJ’aime