Je viens de finir Cinq méditations sur la beauté de François Cheng. Je n’ai pas la prétention de résumer ce petit livre si riche, à lire et à relire… Une citation parmi bien d’autres : « La vraie beauté ne réside pas seulement dans ce qui est déjà donné comme beauté ; elle est presque avant tout dans le désir et l’élan. » Ou cette autre citation : « Dans l’amour comme dans la beauté, tout vrai regard est un regard croisé ».
Elan, croisement du regard… est-ce là cette différence entre une beauté simplement décorative et celle qui remue au plus profond de soi-même ? J’emploie souvent cette expression pour parler de la beauté d’un tableau : « ce tableau me parle ». Je peux rester une heure devant les toiles apparement minimalistes de Rothko : je frissonne en les regardant, dans leur taille réelle, dans leurs teintes qui vibrent, dans leurs couleurs qui s’accordent et s’opposent en même temps… Aucune représentation, donc liberté complète de la « parole » avec le tableau, d’établir une rencontre, non pas avec ce que je vois, mais avec ce que je ressens au delà de ce que je vois.
Cette rencontre, je l’ai aussi aussi vécue avec des tableaux totalement figuratifs, comme la plupart des Rembrandt, certains Dürer, le « Jean Baptiste » de Léonard (alors que Mona Lisa ne m’inspire rien, peut-être pour l’avoir trop vue en reproduction). Et plus proche de nous, avec les tableaux de Françis Bacon dont la violence me foudroie.
Rencontre aussi en musique, avec Mozart, bien sûr qui me donne à partager tout son univers avec lequel j’ai le sentiment d’entrer presque naturellement en relation, comme si c’était le mien. Certaines chansons me font également l’effet d’une rencontre, au delà du charme de la mélodie, de la qualité du texe et du talent des musicens : les deux dernières rencontres ont été celles d’Ali Farka Touré et d’Abd Al Malik dont j’ai souvent parlé dans ce blog.
Je pourrais multiplier les exemples avec le cinéma, la littérature, mais qu’importe… Je voulais juste dire combien ce mot rencontre me semble au coeur de mon expérience de la beauté. Et, sans forfanterie aucune, à mon infime niveau, quand je peins un tableau, je ne sais jamais trop quand je le finis, sauf à partir du moment « où il commence à me parler » et que je peux lui répondre.
Rencontre aussi, répétée fréquemment, avec la beauté de mon jardin à Kerkalou, qui me réserve tant de surprises et me donne tant de bonheur : je commence à en connaître presque chaque « mauvaise herbe » aussi bien que les massifs de rhododendrons et les lilas qui vont fleurir. Cette rencontre est devenu un véritable dialogue que je n’aime pas interrompre trop longtemps.
sympa, votre blog… qui dit pas mal de choses intéressantes sur l’art, la littérature, la politique…
et puis vous avez une drôle de belle maison…
c’est où Kerkalou?
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